« Que la Paix du Seigneur soit toujours avec vous ! »
« Allez et demeurez dans la Paix du Christ ! »
Au moment où nous commençons une nouvelle année pastorale, je n’ai pas d’autre souhait à formuler que ceux-ci. En effet, dans un monde déchiré par la violence, le Seigneur vient nous proposer sa Paix.
Nous le savons bien, le mal et le péché ont désarticulé l’homme et désormais la division habite son cœur, habite toutes les relations avec ses frères et atteint même sa relation avec la création tout entière. Cette situation serait terrible si elle était sans espoir ni espérance, mais heureusement Dieu n’a pu accepter de voir son projet d’amour défiguré. Son amour de création est devenu amour de miséricorde. Désormais il ne cesse de nous proposer sa Paix.
Durant tout l’été, la violence n’a cessé de s’afficher à travers le monde : en Syrie, nous n’y faisons même plus attention, la guerre est devenue une réalité quotidienne où les grandes puissances se défient en soutenant leurs champions respectifs ; des attentats meurtriers au Liban, en Irak et dans bien d’autres pays chaque jour.
Une guerre civile larvée déchire l’est de la République démocratique du Congo, un pays qui regorge de ressources minières, mais justement celles-ci suscitent la convoitise des grands de ce monde, prêts à déstabiliser toutes les ethnies locales pour s’emparer des ressources stratégiques estimées vitales pour eux. Vous ne savez probablement pas ce qu’est le coltan : un minerai qui entre dans la composition de tous les condensateurs de nos appareils électroniques modernes et de nombreux matériels d’aviation. Alors on est prêt à se battre pour s’emparer des gisements partout où ils sont. À Manono, une ville du sud est de la RDC, où j’ai été cet été prêcher une retraite à des prêtres, se trouvent les réserves parmi les plus importantes connues à ce jour de ce minerai. Mais voilà, la ville, cent mille habitants environ, est transformée depuis des années en un champ de ruines par la convoitise des grandes puissances. Bien-sûr, elles ne sont pas venues se battre directement, mais les marchés d’armes demeurent florissants. Dans bien d’autres pays, la situation est identique sans même que nous le sachions.
Chez nous, depuis le début de l’année, à Marseille et ailleurs, de nombreux jeunes de vingt ans ont été assassinés, la vie n’a plus de prix ! Alors que faire devant une telle débauche de violence ? Il y a bien des années, j’étais alors étudiant à Toulouse, nous avions demandé à Dom Helder Camara, l’évêque des pauvres parmi les plus pauvres, qui était venu de Recife au Nord Est du Brésil pour une conférence : « Que pourrions-nous faire pour vous aider ? » Il nous avait répondu : « Commencez par regarder dans votre propre vie tout ce qui est contraire à la justice et au chemin de charité que nous trace l’Évangile. Changez vos vies et alors le monde commencera à changer ! »
Combien de fois nous nous plaignons sur nos conditions de vie, de ressources sans même réaliser que nous vivons en exploitant les pays du sud sans même y prêter attention ! J’ai encore dans mon cœur la vision des paroisses de Manono où ils manquent de tout, pas d’eau, pas d’électricité, pas de livres, où le salaire des prêtres, s’il est possible de parler ainsi, est de 37 dollars américains par mois et nous osons nous plaindre ! Les voitures deviennent inaccessibles, alors il faut reprendre les motos et parfois même voyager de nouveau à pied tout simplement.
Ouvrons nos cœurs, accueillons cette paix que Jésus veut nous donner pour nous réconcilier avec nous-mêmes, avec nos frères et avec la création tout entière. Alors, nous pourrons annoncer à notre tour la bonne nouvelle de l’Évangile, nous pourrons témoigner de Jésus et de toutes les merveilles de Dieu auprès de tous nos frères : « Il a changé ma vie, dans ta vie aussi il veut faire des merveilles ! »
Bienheureux les artisans de paix ! Puissions-nous être de ceux-là !
Bonne rentrée à tous.
Mgr Jean-Pierre Cattenoz
Archevêque d’Avignon