La pierre avait été roulée, tout le monde avait quitté le tombeau et seule la tristesse habitait les cœurs. Dans la nuit du samedi au dimanche, quelques femmes étaient parties pour le cimetière, elles avaient acheté des parfums, elles pensaient pouvoir encore embaumer le corps de leur Seigneur. Les pauvres, elles avaient perdu la tête, jamais on ne rouvre une tombe après trois jours, cela est impensable.
Nous sommes encore en pleine nuit et Marc écrit : « Le soleil étant déjà levé ! » Cela ne veut rien dire, sauf s’il s’agit du soleil de Justice annoncé par Dieu qui se lèverait un jour sur les ténèbres de notre monde. Mais continuons l’enquête, les femmes se demandaient qui allait leur rouler la pierre du tombeau qui, au dire de Marc, était fort lourde. Mais en arrivant, elles voient que la pierre, de fait, est déjà roulée et la tombe ouverte.
Elles entrent et tombent nez-à-nez avec un jeune homme vêtu de blanc ! Mais qui est donc ce jeune homme ? Une enquête s’impose. Dans l’évangile de Marc, nous ne rencontrons un jeune homme qu’une seule autre fois dans tout l’évangile, au moment de l’arrestation de Jésus. Dans les autres évangiles, il y a une autre mention d’un jeune homme, un jeune homme fort riche qui vient demander à Jésus ce qu’il doit faire pour avoir la Vie. Chez Marc, ce jeune homme est devenu un homme, l’évangéliste a volontairement gardé ce mot pour désigner le jeune homme qui était là dans le jardin au moment de l’arrestation de Jésus. Il était vêtu d’un drap et laissant le drap, il s’en alla tout nu ! Et nous retrouvons un jeune homme dans le tombeau vide de Jésus. De plus, l’enquête précise que le mot utilisé pour désigner le vêtement de ce jeune homme à Gethsémani est le même que le mot utilisé pour désigner le drap dans lequel on enveloppa le corps mort de Jésus. Tous ces détails nous sont devenus incompréhensibles, mais dans les premiers siècles de l’Église, leur signification était évidente : les catéchumènes au cours de la semaine sainte se rassemblaient tous vêtus d’un simple drap, comme des esclaves, car ils étaient encore esclaves du péché. Devant l’évêque et les prêtres, ils s’engageaient alors à renoncer à leur esclavage pour adhérer au Christ. Alors, dans la nuit de Pâques, ils descendaient quasiment nus dans les piscines baptismales et en sortant des eaux, ils étaient revêtus d’un vêtement blanc et ils étaient appelés « néaniskoi », « les jeunes hommes », les nouveaux baptisés de Pâques.
Alors, l’évangile de Marc devient compréhensible : le message de Pâques est désormais confié aux nouveaux baptisés. Ils étaient esclaves du péché, le Christ est mort à leur place pour les libérer de leur esclavage et leur donner de naître à une vie nouvelle, ils sont désormais transfigurés en Christ, vivant et rayonnant de sa vie de Ressuscité. Les femmes reçoivent le message du jeune homme vêtu de blanc : « Il est ressuscité, allez dire à Pierre et aux autres : il est vivant et il vous précède en Galilée, c’est là que vous le verrez ». Les femmes s’en allèrent et ne dirent rien à personne, mais cela n’a pas d’importance, car maintenant, le message de Pâques est confié aux nouveaux baptisés. Ils doivent maintenant en témoigner : « Jésus est vivant, il vous précède dans la Galilée de votre vie quotidienne, c’est là que vous le rencontrerez ! » De fait, la Galilée était pour Pierre et les autres, le lieu de leur vie quotidienne, et cela est vrai pour nous tous : Jésus ressuscité nous attend dans notre vie quotidienne, c’est là que nous le rencontrerons. Les baptisés doivent tous en témoigner.
Cette lecture de Marc est fondamentale, elle donne leur mission à tous les baptisés : ils se doivent de témoigner auprès de tous du message de Pâques. Il leur est confié. De leur côté, les évêques, les prêtres, les diacres, leur mission est d’aider les baptisés à remplir leur mission : témoigner de Jésus vivant dans leur vie pour construire le Corps du Christ qui est l’Église !
Pour Marc, le premier témoin de la résurrection de Jésus est le jeune homme vêtu de blanc, et désormais, c’est à vous tous de continuer sa mission.
Bonne fête de Pâques à toutes et à tous : « Jésus est vivant, il vous précède dans votre vie quotidienne, c’est là que vous le rencontrerez ! »
+ Jean-Pierre Cattenoz, archevêque d’Avignon