L’eucharistie, une nourriture indispensable
Bien des “chrétiens” pensent qu’il est possible d’être chrétien sans être pratiquant, mais que diriez-vous de quelqu’un qui voudrait vivre sans jamais se nourrir, ce serait absurde. Un jour au catéchisme j’avais dit à des enfants que la vie de Dieu en nous, il fallait la nourrir de l’eucharistie, qu’à la messe Dieu dressait deux tables pour nous nourrir, celle de sa Parole et celle du corps de son Fils. J’avais dû ajouter que, si nous ne nourrissions pas notre vie de chrétien, elle allait dépérir. Le dimanche suivant, j’ai vu arriver à la messe une maman affolée qui me demanda ce que j’avais dit à sa fille car, le mercredi précédent, elle était rentrée à la maison, avait posé son sac et était venue se planter devant sa maman, la regardant dans le blanc des yeux avant de lui dire : “Toi, maman, tu es morte !” Ce fut l’occasion d’un vrai dialogue avec cette femme qui, grâce à sa fille a retrouvé le chemin d’une véritable vie chrétienne.
Quand des gens me demandent si la messe du dimanche est obligatoire, je leur réponds toujours : “Bien sûr que non, elle n’est pas obligatoire, elle est vitale pour que je puisse grandir en chrétien.”
Le baptême, une naissance
Lors de mes rencontres avec les confirmands, je leur parle toujours du baptême, mais souvent ils ne réalisent pas vraiment ce que c’est. Alors, ensemble, nous ouvrons l’évangile et nous relisons la rencontre de Jésus avec Nicodème : “Il te faut naître de nouveau... Il te faut naître d’eau et d’Esprit” Puis nous essayons de comprendre ce qu’est cette nouvelle naissance qui nous donne de naître à la vie d’enfant de Dieu. Une image toute simple vient nous aider, celles de petites greffes de vie divine que Dieu vient déposer en nous pour nous permettre de le découvrir, de le connaître et surtout de l’aimer comme un enfant aime son Père, son papa, mais cela divinement. Ensemble, nous découvrons à quelle intimité Dieu nous appelle, il veut véritablement que nous devenions membres de sa famille.
Alors commence tout un chemin pour aider les jeunes à découvrir l’Église comme une famille, une communauté, un corps et la catéchèse non comme l’apprentissage d’un savoir, mais comme l’apprentissage de la vie dans une nouvelle famille, dans une nouvelle communauté, la communauté chrétienne. Il faudrait que nous puissions retrouver les grandes intuitions du cheminement catéchuménal avec ses trois grandes étapes, semblables à celles de la venue au monde d’un enfant : la première évangélisation ou fécondation, la catéchèse véritable période gestation puis la naissance à la vie par les sacrements de baptême et de confirmation avant de commencer à se nourrir de Dieu. La première étape est trop souvent oubliée et pourtant elle est fondamentale, elle va permettre à l’Esprit Saint de féconder les cœurs, elle demande plus ou moins de temps selon les personnes ; dans les Actes des Apôtres, nous en voyons les premières traces, les premiers disciples chantent les merveilles de Dieu, ils témoignent de Jésus vivant dans leur vie, et l’auteur nous dit : “D’entendre cela, les gens eurent le cœur transpercé et dirent à Pierre et aux autres : “Frères, que devons-nous faire ?”” Ca y est, les cœurs ont été fécondés, ils sont maintenant ouverts et disponibles pour l’étape suivante, celle de la longue gestation qui va donner corps à la vie divine en eux à travers l’apprentissage de la vie chrétienne et ce n’est pas rien. À ce stade, la grande question est celle de la situation de nos communautés chrétiennes : sont-elles vraiment en mesure de porter en leur sein ces nouveaux enfants ? Interrogation essentielle qui doit conduire nos paroisses à s’interroger sur leur capacité d’enfanter et par là même sur la place qui leur revient dans tout cheminement vers les sacrements qui font un chrétien et spécialement dans cette seconde période où les jeunes doivent pouvoir grandir tout simplement en regardant vivre les chrétiens qui les entourent et en se sentant portés par les uns et les autres à la découverte de cette grande famille que nous formons, de cette grande communauté, de cette grande communion qui est le coeur même de l’Église. Il est impensable qu’un chrétien puisse naître et grandir sans être porté par une communauté, accompagné par elle et cela non seulement avant son baptême, mais également après car un nouveau-né est encore incapable d’être autonome. D’ailleurs un chrétien n’est jamais autonome, il a besoin de ses frères, il a besoin d’une communauté pour vivre.
La confirmation, un don merveilleux
Les catéchistes sont souvent très démunis pour parler aux jeunes de ce qui est au cœur de ce sacrement. Pourtant, des images toutes simples peuvent nous y aider. Au jour de notre confirmation, Dieu fixe en nous comme une grande parabole non pour capter TPS, mais pour recevoir les merveilleuses émissions de l’Esprit Saint. Il pourra ainsi agir en nous quand il voudra et comme il voudra pour nous donner tous ces dons divins et venir ainsi au secours de notre faiblesse pour que nous puissions vivre au niveau de notre vocation d’enfant de Dieu. La condition bien sûr sera que la parabole soit bien branchée, prête à recevoir les émissions divines.
Un exemple me permet d’en montrer le fonctionnement très facilement. Un jour, une dame est venue me demander conseil, elle ne pouvait plus supporter sa voisine et pourtant elle savait qu’elle devait témoigner de l’amour dans sa vie quotidienne, mais elle en était concrètement bien incapable. Que faire ? Je lui ai conseillé d’abord d’aller à l’Église et de prendre le temps de dire merci à Dieu pour toutes les qualités qu’Il avait données à sa voisine. Elle me répondit du tac au tac que Dieu ne lui en avait donné aucune. Je maintins cependant ma demande en ajoutant : “Quand vous rencontrerez votre voisine, vous prierez un instant l’Esprit Saint pour lui demander qu’il vous donne son propre amour divin pour aimer votre voisine” . Quand je la revis quelques jour plus tard, elle n’était plus la même et me dit : “J’ai été à l’église, au début j’ai eu bien du mal à trouver des qualités à ma voisine puis quand même j’ai commencé à découvrir que peut-être Dieu lui avait donné telle ou telle qualité et c’est vrai, elle avait bien plus de qualités que je n’aurais imaginé. Puis le lendemain, quand je l’ai rencontrée, j’ai fait la prière à l’Esprit Saint que vous m’aviez demandée (elle avait ainsi bien branché la parabole !) et quand je suis arrivée à sa hauteur, j’ai commencé à lui dire des mots aimables ce qui ne m’était pas arrivé depuis longtemps. Mais ce n’est pas tout, après une minute ou deux, dans le fond de mon cœur, je me disais : “Maintenant, ça suffit !” Et alors, j’ai entendu comme une voix intérieure qui me disait : “Puisque tu m’as demandé mon amour divin, laisse-le passer !” Et depuis, j’aime vraiment ma voisine, nos relations sont transformées” .
Vous voyez, ce qu’elle n’arrivait pas à faire, l’Esprit Saint est venu le faire en elle, et là est le secret de toute vie chrétienne, de toute sainteté : Je ne suis pas meilleur que les autres, mais peu importe ma pauvreté, mes limites, au contraire, plus je serai pauvre, plus je ne pourrai plus m’appuyer sur mes propres forces et plus je pourrai m’ouvrir à toutes les merveilles que l’Esprit Saint est prêt à faire en moi, c’est lui qui fera tout en moi.
Alors n’ayons pas peur de nous émerveiller devant cette vie nouvelle qui nous a été donnée au baptême, qui trouve toutes ses dimensions dans la confirmation et que nous pouvons nourrir à une table merveilleuse chaque dimanche ; aussi ne nous en privons pas.
+ Jean-Pierre Cattenoz
21 juin 2003