J’ai découvert Jésus, il est présent et vivant dans ma vie. Je marche les yeux fixés sur lui. Ma joie est de m’asseoir à ses pieds pour écouter sa parole à travers son Évangile ; j’ai besoin de prendre du temps pour rester en sa présence dans le silence de la prière. Il est devenu mon Sauveur et le Seigneur de ma vie. Sa lumière illumine mes yeux et je découvre émerveillé sa miséricorde qui m’envahit, me pénètre pour venir me guérir de toutes mes blessures, de tout mon péché et me remettre debout. Son amour divin opère en moi une véritable thérapie divine. Il est là en moi et en sa présence, il m’est donné de retrouver vie.
En même temps, loin de me replier sur moi-même, cette présence divine me fait prendre conscience que je ne suis pas seul : je suis lié à mes frères les hommes, ils sont pour moi des frères, une communion, une fraternité non seulement est possible, mais elle devient vitale. Je découvre en mes frères des membres du même corps, nous sommes membres les uns des autres dans le corps du Christ.
“Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi”, ces mots de Paul (Gal 2, 20) ne cessent de résonner en moi et avec Pierre et Jean, je voudrais pouvoir dire : “De tout cela, j’en suis le témoin, avec l’Esprit Saint que Dieu nous a donné” (cf. Ac 5, 32).
Au moment de commencer le carême, ne pourrions-nous pas tous prendre la résolution de profiter de ce temps qui nous est donné pour approfondir tous ces liens qui nous unissent à Jésus, à sa personne. Pour certains ce sera peut-être une découverte, pour d’autres un chemin de conversion, mais pour nous tous ces liens sont vitaux.
Je ne cesse de rencontrer des personnes pleines de bonne volonté, mais qui pensent que le christianisme est d’abord un attachement à des valeurs, à une morale qui donne sens à nos vies sans qu’il y ait en elles un attachement vital à la personne de Jésus. En réalité, bien sûr je suis, moi aussi, attaché à des valeurs, mais ces valeurs ne sont jamais premières, elles découlent de mon attachement au Christ : parce que je marche à la suite de Jésus, dans sa lumière, je ne pourrai vivre n’importe comment, ma vie devra se calquer sur la sienne.
Dans l’Évangile, Jésus ne nous dit-il pas : “Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive.” Devenir disciple consiste donc à mettre ses pas dans ceux de Jésus, à garder les yeux fixés sur lui, et pour cela il me faut renoncer à moi-même, c’est-à-dire me décentrer de moi-même : désormais Jésus lui-même sera au centre de ma vie, tout ce que je ferai, je le ferai dans sa lumière. Paul nous le dit dans sa lettre aux Éphésiens : “Imitez Dieu comme des enfants bien-aimés” (Ep 5, 1).
Sans cesse l’Évangile nous invite à être comme des enfants, à accepter d’être pauvres, petits, incapables par nous-mêmes de vivre à chaque instant dans l’intimité de Jésus mais, si nous acceptons cette pauvreté, alors Dieu lui-même viendra tout faire en nous, sa puissance divine opérera en nous ce que nous-mêmes nous sommes incapables de faire. Les Actes des Apôtres ne cessent de mettre sous nos yeux cette puissance divine qui éclate à travers la vie et le ministère des apôtres : “On allait jusqu’à sortir les malades sur les places, . ainsi, Pierre quand il passerait, il toucherait l’un ou l’autre de son ombre” (Ac 5, 15). Et les Actes ajoutent : “Et tous ils étaient guéris” (Ac 5, 16). Ce n’est pas Pierre qui guérit tous ces malades, mais le Christ qui habite en lui.
Pendant ce temps de carême, puissions-nous tous retrouver cette présence du Christ au plus profond de nous-même, prendre du temps pour être avec lui, et ensuite, laisser sa lumière rayonner dans notre vie quotidienne, laisser les eaux vives de l’amour divin jaillir et déborder pour rejoindre nos frères.
+ Jean-Pierre Cattenoz
Février 2004