Je l’ai vu venir à la prison le 24 décembre au matin dans ce monde carcéral. Il était là à l’hôpital au début de l’après-midi au milieu des personnes âgées qui, les premières, fêtaient Noël. À Séguret, au milieu de la nuit, au chant des bergers et du tambourinaire, il est venu, personne ne s’en est aperçu et pourtant sans bruit, il venait de naître dans les cœurs. Il fait ainsi depuis 2000 ans pour permettre à notre pauvre humanité de retrouver le chemin de la Vie, le chemin du cœur de Dieu. Il lui en faut de l’imagination et surtout de l’amour pour arriver à faire fondre toutes nos carapaces et trouver le chemin de nos cœurs. Au matin de Noël, dans l’aube froide de la salle de culte du centre pénitentiaire, il était déjà là dans les cœurs ; ils ont été condamnés par les hommes, mais lui, non seulement ne les condamnait pas, mais il était là vivant dans le fond de leur âme pour leur dire l’amour fou de Dieu pour eux. Avec eux, nous avons chanté, “Il est né le divin Messie, jour de joie aujourd’hui sur terre…” À la Métropole, un moment plus tard, l’orgue à sa façon laissait éclater sa joie, joie de toute l’Église, joie de chacun de nous.
Mais déjà, le 26 décembre, nous fêtions saint Étienne dans la lumière de Noël ; lui, le premier martyr venait en témoin, pour témoigner du fruit de la venue de l’Enfant Dieu en lui : dans la joie de Noël, une fois encore, il nous montrait les cieux ouverts et le Seigneur ressuscité rayonnant de la joie pascale qui l’invitait à le rejoindre auprès de son Père et notre Père. Puis, le 27 décembre, l’apôtre saint Jean venait à son tour et nous invitait à relire son évangile. Non seulement, il nous rappelait le mystère : “Et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous et nous avons vu sa gloire, gloire qu’il tient de son Père comme Fils unique plein de grâce et de vérité” ; mais il nous rappelait également qu’ “à tous ceux qui l’ont accueilli, il a donné le pouvoir de devenir enfant de Dieu…” pour ensuite nous inviter à mettre nos pas dans ceux du disciple bien-aimé et à découvrir combien chacun de nous était invité à devenir à son tour le disciple bien-aimé.
Le 28 décembre, nous assistions impuissants au massacre des saints innocents, nous entendions pleurer Rachel qui demeure inconsolable devant le massacre qui continue aujourd’hui encore, massacre de tous les innocents qui ne verront jamais la lumière. Alors il ne nous restait plus qu’à tout déposer aux pieds de l’Enfant Dieu, dans le silence de la prière et de l’offrande du sacrifice eucharistique. De la crèche à la Croix, nous percevions tout le chemin parcouru par Jésus pour nous rejoindre et nous entraîner à sa suite vers le Père au souffle de l’Esprit.
Mais déjà une nouvelle année approchait et l’Église, dans sa Sagesse, nous invitait à une grande action de grâce pour toutes les merveilles dont nous avions été les témoins tout au long de cette année et pour toutes les grâces reçues ! Cette grande action de grâce se mêlait aux vœux que nous formulions les uns pour les autres au milieu de la nuit. Que souhaiter pour tous en ce premier jour de l’année ?
Personnellement, je n’ai qu’un souhait à formuler et pour vous tous et pour moi : que nous entendions la parole de Jésus qui nous invite à la conversion ! Que nous puissions nous laisser saisir par Jésus, que nous apprenions à demeurer non seulement auprès de lui, mais en lui jusqu’à ne faire plus qu’un avec lui. Avec le vieillard Syméon, je voudrais prendre l’Enfant Dieu dans mes bras puis vous le donner à chacun pour que vous le serriez dans vos bras sans rien dire tout en vous laissant réchauffer par sa présence divine toute fragile entre vos mains et vos bras d’homme. La prophétesse Anne est là aussi pour vous témoigner que Dieu seul suffi t pour habiter une vie d’homme et vous inviter à trouver comme elle le chemin de la prière et de l’intimité divine.
Enfin, au matin de ce premier janvier, nous nous tournions vers Marie, la Mère de Dieu, la Mère de l’Église et en elle nous pouvions contempler le plus beau fruit de la venue de Dieu au milieu de nous. N’ayez pas peur de rester là près d’elle, elle remplira sa mission maternelle, elle vous enfantera au souffle de l’Esprit pour que vous deveniez fils dans le Fils. Je lui confie tous les désirs de mon cœur et je vous confie tous à elle. Bonne année à tous dans la joie de la présence de l’Enfant Dieu en nous ! Et surtout ne l’oubliez pas, il est là en vous ! Vivez de sa présence, laissez-vous habiter par elle, transformer par elle dans la puissance de l’Esprit Saint.
+ Mgr Jean-Pierre CATTENOZ
1er janvier 2007